Du 1er au 24 décembre, chaque jour un visage .
Comme le soulignait Daniel Arasse,
« le portrait est inévitablement une méditation sur le temps ».
Ce temps de l’avent — du latin adventus : avènement, arrivée du Messie — représente la période qui couvre les quelques semaines précédant Noël.
Que l’on soit croyant ou pas, c’est un moment particulier dans l’attente du solstice d’hiver où le mouvement repart en direction de la lumière.
Une lumière intérieure affleure dans les regards de ces 24 visages choisis dans l’histoire ancienne et contemporaine de la peinture et de la photographie, parce qu’ils m’ont émue, fascinée, captée.
Parce que, comme dit la chanson, Y’a vraiment qu’l’amour qui vaille la peine, celui de ma famille chérie réunie il y a quelques jours dans le joyeux tourbillon d’une fête qui a absorbé tout mon temps, j’ai choisi d’ouvrir trois fenêtres en une et d’évoquer une autre histoire de tendresse familiale : celles des frères Flandrin.
Trois frères, tous les trois peintres, Auguste, Hippolyte et Paul.

Auguste (1804-1842), Hippolyte (1809-1864) et Paul (1811-1902) Flandrin comptent parmi les artistes les plus importants de la scène artistique à Lyon au XIXe siècle.



Des trois frères, Hippolyte est le plus célèbre. Élève préféré de Jean Auguste Dominique Ingres, il se distingue en tant que peintre d’histoire et par de grands décors. Il compte également parmi les portraitistes les plus recherchés de son temps.
Son frère cadet, Paul, se consacre lui aussi à ce genre mais son domaine de prédilection est le paysage. Le plus âgé, Auguste, demeure le moins connu, en raison d’un décès prématuré.

Les trois frères vont remporter un grand succès dans le genre du portrait, et recevoir de nombreuses commandes de la part de personnalités de la bourgeoisie et de l’aristocratie de leur temps, en particulier Hippolyte. Des portraits, certains assez austères, en robes noires sur fond uni vert où seuls les bijoux apportent quelques éclats de lumière, d’autres plus lumineux et qui tous tendent vers une beauté idéale à la manière d’Ingres.

Si Hippolyte, qui sera Grand Prix de Rome en 1832, académicien et professeur à l’École des beaux-arts, bénéficiant des commandes qui lui sont passées par la Cour du Second Empire, reste sans doute plus célèbre que ses deux frères, ceux-ci n’en avaient pas moins de talent et de créativité, comme en témoignent ces dessins et peinture de Paul et Auguste.



Selon Elena Marchetti1, « les frères se sont attachés à collaborer au fil de leur vie sur leurs projets respectifs et c’est vraiment un trait qui les distingue parmi les artistes du XIXe siècle.
Les Flandrin ont souvent pratiqué le portrait mutuel, réciprocité est un mot clé dans leur art. Et la quintessence de ce concept est représenté par le double portrait croisé de Paul et Hippolyte, conservé au Louvre.

En 1835, en Italie, dans un moment d’apogée de communion artistique les deux frères décident de se représenter mutuellement l’un à Côté de l’autre sur la même feuille.
Hippolyte qui est au premier plan de profil a été dessiné par Paul, tandis que Paul qui est ici à l’arrière plan de face et qui pose affectueusement la main sur l’épaule de son frère, a été dessiné par Hippolyte. L’exécution croisée de l’œuvre met en lumière la complémentarité des talents artistiques et de la relation humaine des deux frères. Une synthèse sublime de fraternité.»

En 1842, Hippolyte et Paul partagent un atelier à Paris. C’est là qu’ils se représentent dans ce double portrait peint du musée d’Arts de Nantes. À l’inverse du dessin du Louvre, Paul est debout au premier plan en train de peindre à son chevalet, tandis qu’Hippolyte, un livre à la main se tient de face, en retrait. À l’arrière plan sont accrochées les œuvres de Paul, des paysages et deux répliques d’œuvres de son frère.
Dans ce double portrait la prééminence est donc accordée à Paul alors qu’Hippolyte à l’époque de la toile, datée de 1842, était beaucoup plus connu. Le tableau est signé de la main de Paul mais plusieurs éléments laissent à penser qu’Hippolyte est intervenu lors de son exécution. Les deux frères ont adopté ce modèle de collaboration tout au long de leur carrière et spécifiquement dans le genre du portait.
Ce tableau constitue en quelque sorte un manifeste de ce travail collaboratif.2
1 Elena Marchetti, conservatrice à la Fondazione Musei Civici de Venise et co-commissaire de l’exposition du musée des Beaux-Arts de Lyon en 2021, Hippolyte, Paul, Auguste : Les Flandrin, artistes et frères
2 Écouter Double Portrait et Double Portrait croisé, Hippolyte et Paul Flandrin, Musée des Beaux-Arts de Lyon

Jean-Pierre Poinas
Il m’est impossible de ne pas vous remercier. Qu’avez-vous donc de plus, ou de différent, si l’on vous compare à tant d’autres qui ont écrit sur la peinture (je m’y suis aventuré moi-même) ? Je ne trouve qu’un mot : l’amour. Il ne suffit pas que vous en parliez avec amour, ce qui est en soi doux à percevoir : vous nous en parlez avec de l’amour pour nous. Votre calendrier de l’avent m’instruit et me va droit au cœur. Merci !
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Barbara
Oh ! C’est moi qui vous remercie…de tout cœur 🙂
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