Du 1er au 24 décembre, chaque jour un visage .
Comme le soulignait Daniel Arasse, 
« le portrait est inévitablement une méditation sur le temps ».
Ce temps de l’avent — du latin adventus : avènement, arrivée du Messie — représente la période qui couvre les quelques semaines précédant Noël.
Que l’on soit croyant ou pas, c’est un moment particulier dans l’attente du solstice d’hiver où le mouvement repart en direction de la lumière.
Une lumière intérieure affleure dans les regards de ces 24 visages choisis dans l’histoire ancienne et contemporaine de la peinture et de la photographie, parce qu’ils m’ont émue, fascinée, captée.

Courant encore derrière le temps, j’ouvre ici deux fenêtres à la fois de mon calendrier de l’Avent en proposant un voyage dans le temps entre hier et aujourd’hui en une image unique et multiple à la fois : une, des photographies de la série Hovedtøj (coiffe en français) de l’artiste Trine Søndergaard que j’ai pu admirer sur les cimaises de Paris Photo en 2019.

Le visage caché de cette première image de dos est d’une présence plus troublante encore que celui que j’imagine.

Dans la série Hovedtøj, des adolescentes portent leurs propres vêtements, mais aussi des pièces plus anciennes telles qu’une coiffe ici, un col ou un tissu d’un siècle précédent.

La réalisation des broderies et textiles historiques a demandé beaucoup plus de temps, de savoir-faire et de compétences que celle des vêtements contemporains et produits en masse des jeunes femmes.

Les vêtements historiques représentent une histoire cachée ou oubliée liée au domaine de l’expérience féminine.
Ainsi, les œuvres créent un lien entre le passé et le présent, unissant différents corps, vêtements et vies […] .

Trine Søndergaard, née le 24 mars 1972 est une artiste contemporaine et photographe danoise. Elle vit et travaille à Copenhague.
En 1996, elle est diplômée de Fatamorgana, l’école danoise de la photographie d’art.
Son travail est d’une précision et d’une sensibilité qui coexistent avec une réflexion sur le médium de la photographie, ses limites et ce qui constitue une image.
Cernées de sens et d’émotion discrète, ses œuvres rendent plus intense notre perception visuelle de la réalité.

La multiplication des points de vue sur ce visage pâle d’adolescente réalise le rêve fou de pouvoir tourner autour d’une image plane comme autour d’une ronde-bosse, d’une sculpture vivante.

Ce visage reste cependant très mystérieux, inaccessible comme cet âge de la vie en équilibre instable entre les deux rives d’un fleuve.
Il me fait penser à ce poème¹ de Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)

Le premier amour

Vous souvient-il de cette jeune amie,
Au regard tendre, au maintien sage et doux ?
À peine, hélas ! Au printemps de sa vie,
Son coeur sentit qu’il était fait pour vous.

Point de serment, point de vaine promesse :
Si jeune encore, on ne les connaît pas ;
Son âme pure aimait avec ivresse
Et se livrait sans honte et sans combats.

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¹ Poésies, Marceline Desbordes-Valmore, Poésie Gallimard N° 178