comme une éphéméride du sensible,
une ou des images choisies ou créées
qui appellent des mots, ou l’inverse…
L’émotion née d’un rayon de soleil qui entre dans une chambre est si particulière, comme une épiphanie des rêves de la nuit.

Elle peut être amoureuse comme dans cette série de photographies de Bernard Faucon ;

subtilement indochinoise dans les Lointains souvenirs de Flore ;

l’intime reflété, avec Eva Rubinstein ;

ou la tiédeur d’un souffle indien chez Dayanita Singh.
Cette émotion peut être encore « une joie confuse et étourdissante », comme je le lis ce matin dans les carnets d’Albert Camus :
« Ce jardin de l’autre côté de la fenêtre, je n’en vois que les murs. Et ces quelques feuillages où coule la lumière. Plus haut, c’est encore les feuillages. Plus haut, c’est le soleil. Et de toute cette jubilation de l’air que l’on sent au dehors, de toute cette joie épandue sur le monde, je ne perçois que des ombres de feuillages qui jouent sur les rideaux blancs. Cinq rayons de soleil aussi qui déversent patiemment dans la pièce un parfum blond d’herbes séchées. Une brise, et les ombres s’animent sur le rideau. Qu’un nuage couvre, puis découvre le soleil, et voici que de l’ombre surgit le jaune éclatant de ce vase de mimosas. Il suffit : cette seule lueur naissante et me voici inondé d’une joie confuse et étourdissante.»
