Calendrier de l’Avent 2024 / 24 fenêtres #18

Du 1er au 24 décembre, chaque jour une, des fenêtres vues par les photographes.

Que l’on soit croyant ou pas, le temps de l’Avent est un moment particulier dans l’attente du solstice d’hiver où le mouvement repart en direction de la lumière.
Ouvrir chaque jour une, des fenêtres vers la lumière : documenter la façon dont les artistes photographes regardent les fenêtres.
Photographie, du grec ancien φῶς, φωτός, phôs, phôtós, lumière et γράφω, gráphô, écrire, littéralement : écrire avec la lumière.

Gachet, 8 janvier 2019, le grand chassis du grenier © Olivier Verley

L’inaccessible de la maison Gachet, photographies d’Olivier Verley

On se dit que cette maison Gachet, qui bénéficie de toutes les protections, ne risque rien, qu’elle a de belles nuits étoilées devant elle sous la falaise hautement consolidée.
Pourtant, je ne peux m’empêcher de songer à E. Poe et à sa terrifiante nouvelle, La chute de la maison Usher. Des passerelles troublantes m’apparaissent en effet entre ces deux maisons, des passerelles de « fiction » qui m’orientent aussi vers de tangibles réalités. S’y rejoignent la mélancolie et la maladie mentale, des ectoplasmes, et des passants considérables que leur célébrité maintient dans les lieux.

C’est avec ces pensées que j’accède, si c’est possible, à l’inaccessible de la maison Gachet, sa carrière et ses labyrinthes, sa clairière où le minéral épouse le végétal, ses abris troglodytes, ses hauteurs. Quand s’y mêlent la neige, le noir et blanc de la photographie, une attention privilégiée aux passagers prestigieux des lieux, la littérature se rapproche, tout autant pour noircir que pour blanchir le tableau.

Olivier Verley, février 20191

Frosted Window Ipswich © Paul Caponigro (1932-2024) – Veritas Editions

Paul Caponigro (né en 1932 à Boston, MA) est une icône vivante dans le monde de l’art photographique. (…)
« Être photographe, c’est avant tout être un observateur… », note-t-il dans l’un des textes qui accompagnent chacune de ses images, réunies dans un livre d’art artisanal en édition limitée de Veritas Press.

(…) Il écrit : « Avec le temps, j’ai réalisé qu’une bonne photographie n’était pas le résultat d’une bonne technique uniquement : le tirage expressif nécessite une profondeur émotionnelle et pas simplement éblouissante et ne peut être artistiquement efficace que si celle du domaine doux de l’émotion est unie à les soucis techniques les plus durs… et cette transition fait passer la photographie d’un support d’enregistrement à un support de transformation. »

Qu’il s’agisse d’une image d’une vitre gelée ordinaire ou d’une photographie de paysage plus vaste sur un site comme Stone Henge, cette esthétique émotionnelle et «transformatrice» est devenue par la suite une signature de ses photographies. Les techniques de composition et d’impression maîtrisées se combinent à des images pleines d’émerveillement et d’histoire, qu’il s’agisse de structures architecturales ou de compositions de natures mortes de fruits sur une simple table de cuisine.(…)2

Kitchen Window, Winter, February 3, 1996 © Allen Ginsberg (1926-1997) 
Fahey/Klein Gallery, Los Angeles

La Fahey/Klein Gallery a présenté en 2023 Muses & Self : Photographs by Allen Ginsberg. Cette exposition de photographies personnelles de Ginsberg équilibre notre compréhension du poète célèbre au franc-parler, figure la plus importante de la Beat Generation.
Au fond, Allen Ginsberg était un témoin et un chroniqueur du monde ; sa profonde admiration pour la beauté du vernaculaire, l’observation intense et la célébration du moment présent ont guidé sa photographie et sa poésie. (…)

« Le caractère poignant d’une photographie vient du fait de regarder en arrière un moment fugace dans un monde flottant. » –Allen Ginsberg

Ginsberg a connu deux périodes photographiques distinctes, du début des années 1950 aux années 1960, puis des années 1980 jusqu’à sa mort en 1997.
Ginsberg a d’abord pris un appareil photo Kodak Retina d’occasion pour prendre des instantanés de nature ludique de ses amis désormais célèbres, dont les écrivains Jack Kerouac, William S. Burroughs, Gregory Corso et Neal Cassady. Ginsberg a perdu cet appareil photo bien-aimé et cela arrêta ses élans photographiques. Pour une vingtaine d’années, ses négatifs et tirages redécouverts déclenchèrent son second flirt avec la photographie.
Avec les encouragements des photographes Robert Frank et Bernice Abbott, Ginsberg a investi dans un meilleur équipement photographique et a réalisé de nouveaux portraits d’amis de longue date et de nouvelles connaissances dont Francesco Clemente, Jean-Michel Basquiat, Toni Morrison et Patti Smith. Ces portraits subtils sont remplis de réalisations complexes sur sa vie qui trouvent écho dans les légendes manuscrites méticuleuses souvent incorporées sous les images.
(…)3


L’inaccessible de la maison Gachet, photographies d’Olivier Verley sur le site de L’Œil de la photographie

2 Extraits de In memoriam : Paul Caponigro (1932-2024), texte publié sur le site de L’Œil de la photographie

3 Extraits de Fahey/Klein Gallery : Muses & Self : Photographies par Allen Ginsberg, texte publié sur le site de L’Œil de la photographie

Laisser un commentaire