C’EST MOI QUI SOULIGNE
Clin d’œil au merveilleux roman de Nina Berberova, et un titre qui parle de lui-même pour une nouvelle série.
Je lis, je souligne…une phrase pour l’idée qu’elle porte et qui me transporte, parfois juste une expression pour sa pertinence, un mot pour son chatoiement.
Un aide-mémoire autant qu’un désir de partager mon enthousiasme pour un livre avec ceux qui me suivent. Et le plaisir d’accompagner ce florilège d’images qui me semblent seyantes.
Aujourd’hui, j’achève la lecture de Signaux sensibles,
Entretien à propos des arts, de Jean-Luc Nancy
et Jérôme Lèbre.
Portrait en creux de Jean-Luc Nancy, un philosophe qui me guide et nourrit mes questionnements sur l’art et le monde et la manière d’en formuler la pensée.
Un dialogue avec Jérôme Lèbre, professeur de philosophie.
C’EST MOI QUI SOULIGNE / SIGNAUX SENSIBLES
/ chapitre I : Les portraits de Jean-Luc Nancy (pages 5 à 61)
« Comme si le texte faisait paraître des sujets parlants à sa surface, ou bien poussés sur lui, de lui, ou flottant sur sa surface liquide, mouvante, imprécise. »

Les îles d’Or, Henri-Edmond Cross, entre 1891 et 1892, huile sur toile, 54 x 59,5 cm, Paris, Musée d’Orsay
« (…) les livres (…) ont toujours été pour moi imagés ou imageants en ce qu’ils font monter, encore une fois comme à la surface d’une eau, des traits, des tonalités, des teintes, des aspects. »

Libro-escultura, Mar Azra
« puisque vous me tendez ce mot »

Portrait de femme, 1912, Juan Gris (1887-1927)
« Peut-être est-ce que je cours après tous les fragments dont je pourrais recomposer une figure absente. »

La Visitation, 1894, Maurice Denis (1870-1943), huile sur toile, 93 x 103 cm, Moscou, musée de l’Ermitage
« La Visitation serait l’allégorie de ce lien entre l’art et la pensée (…) »

Clair de lune, vers 1895, Félix Vallotton (1865-1925), huile sur toile, 41 x 27 cm, Paris, musée d’Orsay
« Depuis très longtemps, je m’étais demandé ce que me voulaient les images. Ce qu’elles me faisaient. Pas seulement les images formées comme telles mais aussi bien celles qui se présentent comme le dehors : cet arbre, ce nuage. Pourquoi cette forme-ci ? Cette teinte, cette nuance, cette inclinaison ? Et j’étais frappé du fait que les images de l’art accentuaient cette interrogation. (…)
![[Clio Team] 1540 Titien Portrait d'homme dit L'Homme aux yeux glauques ou Le Jeune Anglais](https://fragmentsdesens.files.wordpress.com/2017/01/6262841291_a913e36fb2_o.jpg?w=750)
Portrait d’homme, vers 1545, Titien (1489-1576), huile sur toile, 93 x 111 cm, détail, Florence, Palais Pitti, Galleria Palatina
(…) Elles l’intensifiaient en arrêtant l’image sur elle-même. Adolescent, j’ai conçu un attachement tout particulier pour L’Homme aux yeux gris de Titien (en reproduction, je ne l’ai vu que bien plus tard). Sans doute j’y projetais quelque chose, je ne sais pas quoi mais il me forçait à me demander qui il était, puisqu’on ne le nomme pas, et ce qu’il pouvait penser, vouloir, attendre dans cette pose immobile et pourtant si vive, si présente au sens où la présence est une arrivée toujours recommencée, une arrivée sans fin et donc un départ toujours imminent. »

Woven branch circular arch, Andy Goldsworthy 1986
« (…) un faisceau de vibrations, de renvois internes et d’allusions externes, dans un jeu de résonances qui définit une unité singulière (…). »
« L’évidence ne se donne qu’à un regard qui sait la voir. »

Georges Rousse, Couleur
« (…) une certaine « vue », image, allure, qui est aussi un ton, une tension, une énergie… ( ce mot soudain me fait penser à sa proximité en grec – energeia – avec l’évidence – enargeia -, proximité toute phonique mais suggestive…). »
« Quelque chose au moins se dessine : un appel, une interpellation à s’approcher de
l’ « art », à comprendre qu’il n’est pas là pour décorer mais pour être approché, touché, éprouvé, participé si je peux dire. »