Le dit de l’image : un jour, une œuvre, un mot.
Comme une éphéméride du sensible,
une image quotidienne assortie d’un mot, d’une phrase…ou pas.

Odalisque en grisaille, 1824-34, Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) et son atelier, huile sur toile, 109,2 x 83,2 cm, NewYork, The Metropolitan Museum of Art.
« Il y a toutes sortes de gris. Il y a le gris plein de rose qui est le reflet des deux Trianons. Il y a le gris bleu qui est un regret du ciel. Le gris beige couleur de la terre après la herse. Le gris du noir au blanc dont se patinent les marbres. Mais il y a un gris sale, un gris terrible, un gris jaune tirant sur le vert, un gris pareil à la poix, un enduit sans transparence, étouffant même s’il est clair, un gris destin, un gris sans pardon, le gris qui fait le ciel terre à terre, ce gris qui est la palissade de l’hiver, la boue des nuages avant la neige, ce gris à douter des beaux jours, jamais et nulle part si désespérant qu’à Paris au-dessus de ce paysage de luxe, qu’il aplatit à ses pieds, petit, petit, lui le mur vaste et vide d’un firmament implacable, un dimanche matin de décembre au-dessus de l’avenue du Bois. »
Louis Aragon, Aurélien, ch. X, 1944
Jusqu’au 18 février 2018, la National Gallery, à Londres, organise une exposition intitulée « Monochrome » explorant la tradition de la peinture en noir et blanc de ses débuts au Moyen Âge jusqu’à la Renaissance et au XXIe siècle :
« Déjà attestée sous forme d’estompe à la grotte Chauvet (vers -35 000 av. J.-C.), la grisaille, en tant que pratique du camaïeu, connut un grand développement en Europe à partir des années 1300, d’abord dans l’enluminure puis dans la peinture de grand format. La grisaille s’empara également de bien des supports et de couleurs déclinées dans leurs diverses tonalités, avant de s’ouvrir à des techniques indirectes (gravure, photographie, cinéma). Quoiqu’immense, le sujet est abordé ici dans toute sa variété jusqu’à nos jours.»
Hervé Grandsart, Journaliste et Historien de l’art