C’EST MOI QUI SOULIGNE
Clin d’œil au merveilleux roman de Nina Berberova, et un titre qui parle de lui-même pour une nouvelle série. Je lis, je souligne…une phrase pour l’idée qu’elle porte et qui me transporte, parfois juste une expression pour sa pertinence, un mot pour son chatoiement.
Un aide-mémoire autant qu’un désir de partager mon enthousiasme pour un livre avec ceux qui me suivent. Et le plaisir d’accompagner ce florilège d’images qui me semblent seyantes.
« Écrire un texte sur Cézanne est une tâche ardue. De si nombreuses études, de si nombreux essais ont été consacrés à l’homme et à l’œuvre, qu’il est difficile de ne pas répéter ce qui a déjà été dit. (…) je vous entretiendrai (…) de l’aventure spirituelle de Cézanne. Et pour vous parler de cette aventure, il m’a paru intéressant de montrer qu’elle était assez semblable dans son essence, à celle qu’a vécue Shitao, un peintre chinois du dix-septième siècle».
Ainsi commence ce tout petit livre de Charles Juliet, «écrivain à l’œuvre intime et épurée, homme discret et éclectique, à l’écoute de l’être et attentif aux autres ».
C’EST MOI QUI SOULIGNE / SHITAO ET CÉZANNE
Extraits des pages 19 et 20
« (…) « La peinture émane du cœur», affirme Shitao, le cœur étant conçu comme le foyer de toutes les puissances de l’être, de son activité spirituelle et de son activité intellectuelle. La peinture n’est donc pas le seul produit du talent, d’une habileté, d’un savoir-faire. Elle est le fruit d’une richesse de l’être.

Shitao (1642-1707), Dynastie Qing (1644-1912), encre sur papier.
(…) quand le peintre est au travail, c’est tout son être qui se trouve mis en branle et mobilisé.
On comprend dès lors que Cézanne ait pu dire : «Il faut réfléchir. L’œil ne suffit pas. Il faut la réflexion, l’œil et le cerveau tous deux doivent s’entraider.» Et encore : «Ce que j’essaie de vous traduire est plus mystérieux, s’enchevêtre aux racines mêmes de l’être.»

flanc de colline, 1890-2, Paul Cézanne (1839-1906), huile sur toile, 63.5 x 79.4 cm, Londres, The National Gallery
Shitao parlait de « la Suprême Simplicité » et Cézanne lui aussi déclarait : « Je veux être simple. Ceux qui savent sont simples. » J’ajoute : ceux qui ont parcouru le long chemin de la connaissance de soi sont évidemment simples. »

Cercle blanc I, 2007, Fabienne Verdier, Série : « Silencieuse Coïncidence », encre, pigments et vernis sur toile, 185 × 150 cm, Collection Foundation H. Looser, Zurich.
« Ils sont aussi humbles et sereins. Ils se sont décompliqués, dépouillés de leur égocentrisme, ils ont dépassé les conflits qui les entravaient, et ainsi, ils ont accédé à cette simplicité d’être qui va de pair avec l’acquiescement à soi-même.»
Zoomer sur les collines de Cézanne sur le site de la National Gallery, ici