Une tradition détournée, une petite étude de la représentation des attitudes des mains des femmes par les artistes.
Une série d’ex-voto de gestes, de ces mains féminines touchantes et touchées.

Les artistes saisissent si bien la grâce nonchalante des gestes des mains qui accompagnent l’attente du sommeil ou la langueur de l’éveil !

Quand le matin tout semble habillé des mêmes couleurs, que l’esprit reste prisonnier des rêves : sensation de flotter encore un peu entre nuit et jour, temps suspendu.

Une main soutient la tête, l’autre maintient l’ouvrage abandonné sur l’océan de la robe qui, comme le divin kimono plus haut, coule de la méridienne jusqu’au sol. Avant ou après le sommeil, on ne sait. Les deux peintres impressionnistes, le néerlandais G. H. Breitner et l’américain F. C. Frieseke ont emporté avec eux le secret.

Je me demande si Man Ray a imaginé ce geste qui inscrit le beau visage de Nusch Éluard dans une mandorle1 de chair ou si cette artiste surréaliste l’a réalisé spontanément…

Ces gestes de la main posée bien à plat sur le lit, de la tête qui se tourne et du regard absent sont ceux d’un vague à l’âme, d’une mélancolie douce, ici encore dans un entre deux que j’imagine comme un moment d’attente : d’un rendez-vous, d’une lettre, d’un poème de vie, d’amour et de mort ? 2

Quand les yeux clos et le visage apaisé dessinent le repos enfin apprivoisé, les mains, sur le couvre-lit ou sur le mont de Vénus, sont posées comme des fleurs fraîchement cueillies.

1Mandorle, subst. fém. [j’adore ce mot !]
ICONOGRAPHIE. Figure géométrique en forme d’amande; en partic., ovale dans lequel s’inscrivent le Christ ou la Vierge en majesté.
2On peut voir les œuvres d’Edvard Munch dans la grande exposition Un poème de vie, d’amour et de mort au musée d’Orsay jusqu’au 22 janvier 2023.